Un dégustation hors-norme #1

mardi 26 juillet 2011
97% des vins que nous dégustons à la Revue sont âgés de 2, 3, 4 ans max. Les plus grands sont timides, serrés, sur la réserve. Le jeu est de les noter en estimant leur potentiel de garde. Nous verrons dans plusieurs années si les 2008 de Champagne sont étincelants, si les 2009 de Bourgogne sont magnifiques, si les 2009 de Bordeaux sont immenses...

Mercredi dernier, deux fous, deux frères, nous ont offert une dégustation spectaculaire(issime) !


Dans un restaurant du VIIe arrondissement de Paris le bal commence avec un magnum de blanc de blancs fougueux, tranchant serré, encore très jeune sur des notes grillées et d'agrumes. La matière est belle et fraîche, facile, un poil consensuelle : Dom Ruinart 1998 (16,5/20). Déjà 13 ans mais il impressionne par son incroyable jeunesse, les impatients le passeront en carafe, les autres attendront au moins trois ans pour la sabrer.




Dd'O dégaine un magnum doré, évolué, col(or)é, finement boisé, cire d'abeille, morilles, miel... L'effervescence s'estompe dans le verre, mais le jus est vineux et impressionne par sa puissance douce canalisée tout en longueur. Bien épanoui, un fil d'acidité est encore là pour le faire tenir, il fallait l'ouvrir ce soir ! Une poularde aux morilles fera l'affaire du champagne de James Bond dans Demain ne meurs jamais : Bollinger La Grande Année 1989 (17/20



En réponse, JM sort de sa jupe une bouteille de Bollinger La Grande Année 1999 (17,5/20), riche, vineux, d'un fruit mûr et brillant, il trace une allonge intense et fraîche. Un délicieux classique de Grande Année. Racée, c'est une version plus tonique qui ira beaucoup plus loin que le 2000, rond, dodu et bien ouvert, la pointe mentholée ne saura lui donner assez de fraicheur pour durer. A boire absolument.


Mine de rien, nous voyons nos verres se défaire doucement de leur robe dorée... Les effervescents laissent place tranquillement au Meursault-Perrières 2004 des Comtes Lafon. Un bouquet très murisaltien s'ouvre doucement, une chair poignante, dense et grasse mais tendue par la minéralité du premier cru. Schizophrène, pour les novices, il se montre ultra-gourmand, pour les amateurs, il se change en grand meursault perforant. Le genre de bouteille qu'on boit d'un trait. En face, un corton-charlemagne 2000 de Roumier est bien évolué, facile, enrobant avec une pointe exotique, l'émotion n'est pas aussi grande. Buvez-le !



Les rouges ne couraient pas la table ce soir là mais le Clos de Tart 1998 impressionnait par sa concentration, sa puissance et sa droiture. Encore jeune et une structure carrée, mais un grain de tanins très très fin. A garder longtemps, longtemps...






Nous terminons la soirée avec un magnum de Comtes de Champagne 1964 (même pas né !) qui malheureusement n'avait pas survécu. Certainement à cause une vie malmenée... De la même année, JM est bien mieux conservé ((((:

Quelle soirée ! Thank you the foos !




Autres vins dégustés:
Charmes-Chambertin Joseph Roty 2004
Laurent Perrier Grand Siècle des années 1970 magnum
Dom Ruinart 1986 magnum
Sauternes Château Coutet 1964

Le Relais Louis XIII, révélation des sens et du portefeuille

lundi 18 juillet 2011
Rue des Grands Augustins, les mythes se côtoient : au 7, l’ancien atelier du plus célèbre des cubistes, au 8 le fameux restaurant du plus juste des chefs parisiens. Au relais Louis XIII tout respire le bon goût et la sobriété à l’ancienne : le splendide plafond à la française avec poutres apparentes couvre de son œil bienveillant une petite salle de restaurant décorée avec soin et goût, dans le souci de laisser à chaque convive son intimité. En y entrant, on quitte l’effarant empressement de la modernité parisienne pour gagner une temporalité
propre à l’établissement. L’accueil tout en simplicité témoigne d’une adresse qui n’a plus rien à prouver et dont pourtant on ne parle pas assez, en dépit de ses deux étoiles au Michelin.

Manuel Martinez, le chef, a fait ses classes à la Tour d’Argent, excusez du peu. Meilleur Ouvrier de France, il s’est installé depuis 1996 dans ce restaurant d’art et d’essai du quartier Saint Germain. Amateurs avertis, courez-y : il en existe peu de semblable à Paris. Il n’est plus besoin d’écumer les palaces tape-à-l’œil et d’y laisser son portefeuille lors des anniversaires, des mariages, des fêtes de famille…. 50€ par convive le midi, 80 le soir, le Louis XIII vous ouvre sa carte : un amuse bouche, une entrée, un plat et un dessert au choix. Et bien sûr, un bon souverain n’oublie jamais de couvrir de petites attentions ses hôtes d’un jour : mignardises avec le café et une carte des vins restreinte mais qui ne souffre aucune médiocrité : Guigal, Vernay, Dauvissat… à des tarifs raisonnables. Mon conseil : Vincent Pinard, Nuance 2009 en Sancerre.

Dans l’assiette, une cuisine de saison qui a juste sur tous les tableaux : pas de surenchère inutile de saveurs, des cuissons parfaites, des portions généreuses sans être excessives, un service classique en trois temps et au rythme des convives. Je vous laisse, il est temps pour moi d’aller y déguster quelques ravioles de homard, un ris de veau aux fèves ou peut-être un saint-pierre pour 50 malheureux deniers en plein cœur de Saint Germain. Une cuisine juste à un prix dérisoire : la simplicité du produit dans sa plus belle maturité alliée à l’intelligence d’un service qui sait s’effacer pour prolonger le songe d’une gourmandise d’été. On se donne rendez-vous là-bas ?

G.D.

Le Relais Louis XIII, 8 Rue Grands Augustins - 75006 Paris. Tél. 01 43 26 75 96
Menu: 50 € (midi), 80 € (soir sauf le samedi)
Carte: 130 à 150 €